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rentrent en ville, luttant à l’envi de prouesses d’équitation, ces joyeux pèlerins tiennent à honneur de montrer le butin qu’ils ont récolté sur les cerros.

Les amancaës décorent les boutonnières, s’enlacent aux chapeaux en couronnes, s’épanouissent à toutes les mains en gerbes d’or, et la bruyante cohorte, qui semble porter la livrée du printemps, se déroule et défile, la chanson ou l’éclat de rire aux lèvres, sur l’alameda, entre deux haies de curieux accourus pour assister à son pittoresque défilé.


III


L’alameda Viejo. — La Perricholi. — Les cofradias d’esclaves. — Une version de la Genèse.

L’Alameda Viejo, que les gens de couleur remplissent ainsi d’animation joyeuse le jour des Amancaës, est encore palpitante des souvenirs d’une cholita, qui fut comédienne de talent, favorite d’un vice-roi, et qui est restée célèbre à Lima sous le nom de Perricholi. La maison qu’elle habitait, placée à l’entrée de la promenade, se distingue par une charmante galerie mauresque, fenestrée dans sa partie supérieure comme ces branches d’éventail découpées à l’emporte-pièce. Près de cette maison, et dominant la muraille élégamment dentelée d’un vaste enclos, on aperçoit, semblable à un arc de triomphe, une sorte de portique chargé d’ornements en stuc et accosté d’une série d’arcades. Ce monument, construit sous la vice-royauté d’Amat, devait être affecté à un vaste bain de femmes. Des tuyaux disposés avec art devaient conduire un cours d’eau voisin vers différents point de l’architecture, d’où, retombant en cascade, il serait venu remplir un vaste réservoir. Ce bel ouvrage, connu sous le nom de Bains de la Perricholi, ne put être achevé sous la vice-royauté d’Amat, et son