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bordé de clinquant, avec une croix rouge sur la poitrine et des ailes aux omoplates ; jupon de gaze très-court, parsemé de roses, maillot couleur de chair et petits souliers de satin brodés de filigrane. — Le divin bambino des riches reliquaires n’est pas plus coquettement vêtu. — Tous tiennent en main une corbeille remplie de fleurs effeuillées qu’ils lancent incessamment comme s’ils donnaient l’essor à des myriades de papillons multicolores. Derrière eux s’avance l’archange Michel, l’épée haute et menaçante ; il porte un casque d’or au cimier ondoyant, quelquefois une cuirasse ; mais, le plus souvent, son costume est à peu près celui d’un troubadour de pendule. À son côté marche le Précurseur, saint Jean, vêtu d’une peau de mouton, guidant d’une main une brebis sans tache, élevant, de l’autre, une croix latine rouge et ornée de bandelettes ; puis l’on voit venir, sévèrement drapée dans la bure, le front couronné d’aubépine et courbé sous le poids des remords, la chevelure éparse mais splendide, comme au jour où ses ondes soyeuses essuyèrent le nard répandu sur les pieds du Sauveur, Marie-Madeleine, la tendre pécheresse ; elle porte un crucifix et une tête de mort sur laquelle semble rivé son regard, indifférent aux choses de ce monde[1]. — Le cortége défile solennellement sous une pluie de fleurs qui tombent des fenêtres ; une foule pieuse le suit à flots pressés en chantant des litanies ; une foule curieuse et moins recueillie stationne aux carrefours et forme la haie sur son passage. — Une sorte de sérénité

  1. Brest est l’une des rares localités bretonnes qui conservent encore le personnage de Marie-Madeleine.