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par politesse. Je lui disais : « Mais non, mais non, tu es folle. » Hélas ! j’étais trop sensible à la jeunesse pour ne pas envisager que je me détacherais de Marthe, le jour où sa jeunesse se fanerait, et que s’épanouirait la mienne.


Bien que mon amour me parût avoir atteint sa forme définitive, il était à l’état d’ébauche. Il faiblissait au moindre obstacle.


Donc, les folies que cette nuit-là firent nos âmes nous fatiguèrent davantage que celles de notre chair. Les unes semblaient nous reposer des autres ; en réalité elles nous achevaient. Les coqs, plus nombreux, chantaient. Ils avaient chanté toute la nuit. Je m’aperçus de ce mensonge poétique : les coqs chantent au lever du soleil. Ce n’était pas extraordinaire. Mon âge ignorait l’insomnie. Mais Marthe le remarqua