Page:Radiguet - Le Diable au corps, Grasset, 1923.djvu/75

Cette page a été validée par deux contributeurs.

petite. La sagesse eût été de me servir de moyens de correspondre aussi grossiers que la parole ou le geste, tout en déplorant qu’il n’en existât point de plus subtils.

À me voir tous les jours m’enfoncer de plus en plus dans ce mutisme délicieux, Marthe se figura que je m’ennuyais de plus en plus. Elle se sentait prête à tout pour me distraire.

Sa chevelure dénouée, elle aimait dormir près du feu. Ou plutôt je croyais qu’elle dormait. Son sommeil lui était prétexte, pour mettre ses bras autour de mon cou, et une fois réveillée, les yeux humides, me dire qu’elle venait d’avoir un rêve triste. Elle ne voulait jamais me le raconter. Je profitais de son faux sommeil pour respirer ses cheveux, son cou, ses joues brûlantes, et en les effleurant à peine pour qu’elle ne se réveillât point ; toutes caresses qui ne sont pas, comme on croit, la menue monnaie de l’amour, mais, au