Page:Radiguet - Le Diable au corps, Grasset, 1923.djvu/235

Cette page a été validée par deux contributeurs.

instants, avec la douleur. Du moins, je le croyais. Mais rien ne ressemble moins aux choses elles-mêmes que ce qui en est tout près. Un homme qui a failli mourir croit connaître la mort. Le jour où elle se présente enfin à lui, il ne la reconnaît pas : « Ce n’est pas elle », dit-il, en mourant.


Dans sa lettre Marthe me disait encore : « Il te ressemble ». J’avais vu des nouveau-nés, mes frères et mes sœurs, et je savais que seul l’amour d’une femme peut leur découvrir la ressemblance qu’elle souhaite. « Il a mes yeux », ajoutait-elle. Et seul aussi son désir de nous voir réunis en un seul être pouvait lui faire reconnaître ses yeux.

Chez les Grangier, aucun doute ne subsistait plus. Ils maudissaient Marthe, mais s’en faisaient les complices, afin que le scandale ne « rejaillît » pas sur la famille. Le médecin, autre complice