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était celui de Jacques. N’était-il pas venu en permission neuf mois auparavant. Ainsi, depuis ce temps, Marthe me mentait. D’ailleurs, ne m’avait-elle pas déjà menti au sujet de cette permission ! Ne m’avait-elle pas d’abord juré s’être pendant ces quinze jours maudits refusée à Jacques, pour m’avouer, longtemps après, qu’il l’avait plusieurs fois possédée !


Je n’avais jamais pensé bien profondément que cet enfant pût être celui de Jacques. Et si, au début de la grossesse de Marthe, j’avais pu souhaiter lâchement qu’il en fût ainsi, il me fallait bien avouer, aujourd’hui, que je croyais être en face de l’irréparable, que, bercé pendant des mois par la certitude de ma paternité, j’aimais cet enfant, cet enfant qui n’était pas le mien. Pourquoi fallait-il que je ne me sentisse le cœur d’un père, qu’au moment où j’apprenais que je ne l’étais pas !