Page:Radiguet - Le Diable au corps, Grasset, 1923.djvu/225

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Mon père me conseillait des distractions. Ces conseils-là sont engendrés par le calme. Qu’avais-je à faire, sauf ce que je ne ferais plus ? Au bruit de la sonnette, au passage d’une voiture, je tressaillais. Je guettais dans ma prison les moindres signes de délivrance.

À force de guetter des bruits qui pouvaient annoncer quelque chose, mes oreilles, un jour, entendirent des cloches. C’étaient celles de l’armistice.


Pour moi, l’armistice signifiait le retour de Jacques. Déjà, je le voyais au chevet de Marthe, sans qu’il me fût possible d’agir. J’étais éperdu.

Mon père revint de Paris. Il voulait que j’y retournasse avec lui : « On ne manque pas une fête pareille. » Je n’osais refuser. Je craignais de paraître un monstre. Puis, somme toute, dans ma frénésie de malheur, il ne me déplaisait pas d’aller voir la joie des autres.

Avouerais-je qu’elle ne m’inspirât pas