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Cet acte lui représentait un tel dévergondage qu’il ne pouvait s’agir d’amour. Que je fusse l’amant de Marthe signifiait pour ma mère qu’elle en avait d’autres. Mon père savait combien faux peut être un tel raisonnement, mais l’utilisait pour jeter un trouble dans mon âme, et diminuer Marthe. Il me laissa entendre que j’étais le seul à ne pas « savoir ». Je répliquai qu’on la calomniait de la sorte à cause de son amour pour moi. Mon père, qui ne voulait pas que je bénéficiasse de ces bruits, me certifia qu’ils précédaient notre liaison, et même son mariage.


Après avoir conservé à notre maison une façade digne, il perdait toute retenue, et, quand je n’étais pas rentré depuis plusieurs jours, envoyait la femme de chambre chez Marthe, avec un mot à mon adresse, m’ordonnant de rentrer d’urgence ; sinon il déclarerait ma fuite à la préfecture de police