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Marthe se levait de table et servait. Les domestiques avaient suivi Mme Grangier à la campagne, car, toujours par prudence, Marthe prétendait n’aimer vivre que comme Robinson. Ses parents, croyant leur fille romanesque et que les romanesques sont pareils aux fous qu’il ne faut pas contredire, la laissaient seule.

Nous restâmes longtemps à table. Paul montait les meilleures bouteilles. Nous étions gais, d’une gaîté que nous regretterions sans doute, car Paul agissait en confident d’un adultère quelconque. Il raillait Jacques. En me taisant, je risquai de lui faire sentir son manque de tact ; je préférai me joindre au jeu plutôt qu’humilier ce cousin facile.

Lorsque nous regardâmes l’heure, le dernier train pour Paris était passé. Marthe proposa un lit. Paul accepta. Je regardai Marthe d’un tel œil, qu’elle ajouta : « Bien entendu, mon chéri,