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ou non. Je pensai à l’inconvenance de cette scène chez Marthe, mais, me répétai-je, en somme je ne retire rien à notre amour. Je désirais Svéa comme un fruit, ce dont une maîtresse ne peut être jalouse.

Je tenais sa main dans mes mains qui m’apparurent pataudes. J’aurais voulu la déshabiller, la bercer. Elle s’étendit sur le divan. Je me levai, me penchai à l’endroit où commençaient ses cheveux, duvet encore. Je ne concluais pas de son silence que mes baisers lui fissent plaisir ; mais incapable de s’indigner, elle ne trouvait aucune façon polie de me repousser en français. Je mordillais ses joues, m’attendant à ce qu’un jus sucré jaillisse, comme des pêches.

Enfin j’embrassai sa bouche. Elle subissait mes caresses, patiente victime, fermant cette bouche et les yeux. Son seul geste de refus consistait à remuer faiblement la tête de droite