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dant de venir, de penser à nous, et de lui écrire sur sa table.


Je m’étais juré de ne pas l’accompagner jusqu’à Paris. Mais je ne pouvais vaincre mon désir de ses lèvres et, comme je souhaitais lâchement l’aimer moins, je mettais ce désir sur le compte du départ, de cette « dernière fois » si fausse, puisque je sentais bien qu’il n’y aurait de dernière fois sans qu’elle le voulût.

À la gare Montparnasse, où elle devait rejoindre ses beaux-parents, je l’embrassai sans retenue. Je cherchais encore mon excuse dans le fait que, sa belle-famille surgissant, il se produirait enfin un drame décisif.

Revenu à F…, accoutumé à n’y vivre qu’en attendant de me rendre chez Marthe, je tâchai de me distraire. Je bêchai le jardin, j’essayai de lire, je jouai à cache-cache avec mes sœurs, ce qui ne m’était pas arrivé depuis cinq ans. Le soir, pour ne pas éveiller