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n’échappe à la naïveté. Celle de la vieillesse n’est pas la moindre. Cette prétendue clairvoyance m’assombrissait tout, me faisait douter de Marthe. Plutôt, je doutais de moi-même, ne me trouvant pas digne d’elle. Aurais-je eu mille fois plus de preuves de son amour, je n’aurais pas été moins malheureux.

Je savais trop le trésor de ce qu’on n’exprime jamais à ceux qu’on aime, par la crainte de paraître puéril, pour ne pas redouter chez Marthe, cette pudeur navrante et je souffrais de ne pouvoir pénétrer son esprit.


Je revins à la maison à neuf heures et demie du soir. Mes parents m’interrogèrent sur ma promenade. Je leur décrivis avec enthousiasme la forêt de Sénart et ses fougères deux fois hautes comme moi. Je parlai aussi de Brunoy, charmant village où nous avions dé-