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LE BAL DU COMTE D’ORGEL

Mme d’Orgel s’était cru libre d’attribuer à sa prédilection pour François le sens qu’elle voulait. Ainsi avait-elle moins combattu un sentiment que la crainte de lui donner son véritable nom.

Ayant jusqu’ici mené de front le devoir et l’amour, elle avait pu imaginer, dans sa pureté, que les sentiments interdits sont sans douceur. Elle avait donc mal interprété le sien envers François, car il lui était doux. Aujourd’hui ce sentiment, couvé, nourri, grandi dans l’ombre, venait se faire reconnaître.

Mahaut dut s’avouer qu’elle aimait François.


Dès qu’elle se fut prononcé le mot terrible, tout lui sembla clair. L’équivoque des derniers mois se dissipa. Mais après trop de clair obscur, ce grand jour l’aveuglait. Bien entendu, elle ne pensait pas à regagner ses brumes ; elle eût voulu agir sur l’heure, mais

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