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LE BAL DU COMTE D’ORGEL

— Oui. C’est dommage, dit Mahaut, avec un sourire contraint.

Tous deux enfermés seuls, ce qui ne leur était jamais arrivé, ils ne savaient quoi se dire. Il semblait à chacun qu’il fallait jouer un rôle et qu’ils avaient négligé de l’apprendre. L’insouciance ne s’improvise pas. À ce moment, Séryeuse comprit ce que son amour avait d’impossible.

Mahaut et lui, face à face, loin d’être à l’aise, pensaient au comte d’Orgel. L’absence les gênait de celui dont la présence gêne d’habitude les amants.

La nuit tombait. Eux-mêmes étaient déjà si obscurcis qu’ils n’y prirent pas garde. Un domestique entra. Il portait le goûter. Alors Mme d’Orgel se réveilla, s’aperçut qu’il faisait noir.

Sur un ton de reproche et comme si ce domestique eût été responsable de la nuit, elle ordonna d’allumer.

D’une table basse François retira un album. « Regardez-le, dit Mahaut, cela

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