elle dit ensuite que sa douleur l’affligeoit trop, et qu’il falloit la laisser mourir tranquillement. Elle mourut dans mes bras, mademoiselle, avec le calme d’un enfant ; la crise violente étoit passée.
Dorothée s’arrêta et pleura. Emilie pleura avec elle ; elle étoit attendrie par la bonté de la marquise, et par la douce patience avec laquelle elle avoit souffert.
— Quand le médecin vint, reprit Dorothée, hélas ! il étoit trop tard ! Il parut étonné en voyant le corps de ma maîtresse ; sa figure étoit devenue noire. Il fit sortir tout le monde, et me fit de singulières questions au sujet de la marquise et de sa maladie. Il secouoit la tête à mes réponses, et paroissoit en penser plus qu’il n’en vouloit dire. Je le compris trop bien ; néanmoins je gardai mes conjectures pour moi ; je n’en fis part qu’à mon mari, qui me recommanda de me taire. Quelques autres domestiques formèrent pourtant les mêmes soupçons ; ils circulèrent dans le voisinage, mais jamais on ne les publia. Quand le marquis sut que madame étoit morte, il s’enferma, et ne voulut voir que le médecin. Ils restèrent plus d’une heure ensemble, et le docteur ne me parla plus de madame. On l’enterra dans l’église du couvent. Tous