garnison. Parmi les personnes qu’on enleva avec Montoni, se trouvoit Orsino, l’assassin. Il avoit rejoint Montoni à Udolphe, et Morano l’ayant appris après le malheureux effort qu’il avoit fait pour enlever Emilie, en avoit averti le sénat. Le désir de prendre cet homme, qui avoit fait tuer un sénateur, étoit un des motifs qui avoit fait presser l’entreprise. Le succès en fut si agréable à tout le corps, que, malgré les soupçons politiques et l’accusation secrète de Montoni, Morano fut relâché sans délai. La célérité, la facilité de cette expédition, prévinrent l’éclat et la rumeur publique. Emilie, en Languedoc, ignora la défaite et l’humiliation de son cruel persécuteur.
Son esprit étoit si accablé par ses chagrins, qu’aucun effort de sa raison ne pouvoit en surmonter l’effet. Le comte de Villefort essaya tous les moyens de consolation. Quelquefois il l’abandonnoit à la plus entière solitude ; quelquefois il l’attiroit à des réunions paisibles, et la protégeoit de son mieux contre les questions trop curieuses et les critiques de la comtesse : il l’invitoit souvent à de longues promenades avec lui et sa fille, et sans paroître le chercher, il amenoit la conversation sur des sujets assortis à son goût ; il espéroit l’enlever