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tôt remise, elle le pria d’ordonner son départ, et de lui laisser emmener Annette. — Montoni sourit alors. Il étoit nécessaire de vous tromper, dit-il, c’était l’unique moyen de vous faire agir raisonnablement : vous partirez, mais pas à présent. Il faut d’abord que je prenne possession de ces biens ; quand cela sera fait, vous pourrez, si vous voulez, retourner en France.

La froide scélératesse avec laquelle il violoit un engagement formel qu’il venoit de prendre, mit Emilie au désespoir ; elle demeura certaine que son sacrifice n’auroit aucune utilité, et qu’elle resteroit prisonnière ; elle n’avoit point de mots pour exprimer ses sentimens, et sentait bien que tout discours seroit sans effet ; elle regardoit Montoni de la manière la plus touchante. Il détourna les yeux, et la pria de se retirer. Incapable de le faire, elle se jeta sur une chaise près de la porte, et poussa de profonds soupirs sans trouver de larmes ni de paroles.

— Pourquoi vous livrer à cette douleur d’enfant ? lui dit-il ; efforcez-vous de supporter avec courage ce que maintenant vous ne pouvez éviter. Vous n’avez aucun mal réel à pleurer ; prenez patience, et l’on