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nuit, elle se voyoit sous leur conduite au milieu de montagnes sauvages et solitaires, et sans savoir où elle alloit, une terreur affreuse la saisit, et devint toujours moins supportable par la nécessité d’en dérober tous les symptômes. En réfléchissant bien au caractère, aux menaces de Montoni, il n’étoit pas invraisemblable qu’il l’eût livrée à ces monstres pour être immolée par leurs mains, et qu’il se disposât ainsi à s’emparer, sans plus d’opposition, de ses propriétés, objet de si longues et si funestes contestations. Si néanmoins tel étoit son dessein, étoit-il nécessaire de l’envoyer si loin ? Si la crainte d’être découvert ne lui permettoit pas de consommer le crime au château, on pouvoit le commettre avec sécurité beaucoup plus près. Ces considérations ne se présentèrent pas immédiatement à Emilie ; et tant de circonstances réveilloient sa terreur, qu’elle ne pouvoit y résister, ou les calculer de sang froid. Elle n’osoit plus causer avec ses conducteurs. Le son de leurs voix la faisoit trembler, et quand, par intervalles, elle jetoit sur eux un coup-d’œil, leurs figures à moitié couvertes par les ombres du soir, ne servoient qu’à l’effrayer davantage.

Le soleil étoit couché depuis long-temps ;