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lon, il y avoit un village où l’on arriveroit avant même le coucher du soleil.

Saint-Aubert prit ce dernier parti. Michel finit son repas, attela ses mules, se remit en route, et l’instant d’après s’arrêta. Saint-Aubert l’apperçut qu’il saluoit une croix plantée sur la pointe d’un rocher au bord du chemin ; la dévotion finie, il fit claquer son fouet ; et sans égard ni pour la difficulté du chemin ni pour la vie de ses pauvres mules, il les mit au grand galop, au bord d’un précipice dont l’aspect faisoit frissonner ; l’effroi d’Emilie la priva presque de ses sens ; Saint-Aubert qui redoutoit encore plus le danger d’arrêter soudain, fut contraint de se rasseoir et de tout abandonner aux mules, qui parurent plus sages que leur conducteur, tes voyageurs arrivèrent sains et saufs dans la vallée, et s’arrêtèrent sur le bord d’un ruisseau.

Oubliant désormais la magnificence des vues étendues, ils s’enfoncèrent dans cet étroit vallon. Tout y étoit solitaire et stérile ; on n’y voyoit aucune créature vivante que le bouquetin des montagnes qui, parfois, se montroit tout-à-coup sur la pointe élancée de quelque rocher inaccessible. C’étoit un site tel que l’eût choisi