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Emilie moins oppressée se seroit amusée ; sans doute la diversité des caractères, de la conversation qui eut lieu pendant le dîner, la magnificence même de ce repas, fort au-dessus de tout ce qu’elle avoit encore vu, n’eussent pas manqué de la divertir. Le signor Montoni, nouvellement arrivé d’Italie, racontoit les troubles et les commotions dont ce pays étoit agité. Il peignoit les différens partis avec chaleur. Il déploroit les conséquences probables de ces affreux tumultes. Son ami parloit avec autant d’ardeur : de la politique de sa patrie. Il louoit le gouvernement et la prospérité de Venise, et vantoit sa supériorité décidée sur tous les états de l’Italie. Il la tourna ensuite vers les dames, et parla avec la même éloquence des modes françaises, des spectacles français et des manières françaises. Il eut grand soin de mêler dans son discours tout ce qui pouvoit flatter le goût français. La flatterie ne fut point apperçue par ceux à qui elle s’adressoit, mais l’effet qu’elle produisit sur leur attention n’échappa point à sa perspicacité. Quand il put se dégager des autres dames, il s’adressa à Emilie. Mais elle ne connoissoit ni les modes parisiennes, ni les spectacles parisiens, et sa modestie, sa sim-