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quence est un mal tout excès est un tort ; le chagrin même, quoique aimable dans son principe, devient une passion injuste, quand on s’y livre aux dépens de ses devoirs. Par devoirs, j’entends ce qu’on se doit à soi-même, aussi bien que ce qu’on doit aux autres. Une douleur sans règle énerve l’ame ; et la prive de ces douces jouissances qu’un Dieu bienfaisant destine à embellir notre vie. Ma chère Emilie ! appelez, pratiquez tous les préceptes que vous avez reçus de moi, et dont l’expérience vous a souvent démontré la sagesse.

Votre douleur est inutile ; ne regardez pas cette vérité comme un lieu commun de consolation, mais comme un véritable motif de courage. Je ne voudrois pas étouffer votre sensibilité, mon enfant, je ne voudrois qu’en modérer l’intensité. Quels que puissent être les maux dont un cœur trop tendre est la cause, on ne doit rien espérer de celui qui ne l’est point. Vous connoissez ma peine, vous savez si mes paroles sont de ces discours légers, jetés au hasard, pour dessécher la sensibilité dans sa source, et dont le but unique est le frivole étalage d’une prétendue philosophie. Je vous montrerai, mon Emilie, que je puis pratiquer les conseils que je