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reprit courage, et s’avança, quoique en tremblant, vers la pêcherie, elle n’y vit personne ; le luth étoit sur la table, et chaque chose comme on l’avoit laissée. Emilie commençoit à croire qu’elle avoit entendu un autre instrument ; mais elle se ressouvint, qu’en suivant monsieur et madame Saint-Aubert, elle avoit posé son luth près de la fenêtre ; elle se sentit alarmée, sans en savoir la cause ; l’obscurité du soir, le silence de ce lieu, qu’interrompoit seulement le frémissement léger des feuilles, augmentèrent ses craintes enfantines ; elle voulut sortir, mais elle s’apperçut qu’elle s’affoiblissoit, et fut obligée de s’asseoir : elle essayoit de se remettre, quand ses yeux rencontrèrent les vers écrits au crayon ; elle tressaillit, comme si elle eût vu un étranger, puis, s’efforçant enfin de vaincre sa terreur, elle se leva, et s’approcha de la fenêtre ; d’autres vers étoient ajoutés aux premiers, et cette fois, son nom y figuroit.

Il ne fut plus possible de douter que l’hommage n’en fût pour elle, mais il ne lui fut pas moins impossible d’en deviner l’auteur. Tandis qu’elle y rêvoit, elle entendit le bruit de quelques pas derrière le bâtiment ; effrayée, elle prit son luth, s’échappa, et