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menta le désir qu’elle avoit de goûter une triste jouissance en faisant aussi ses adieux aux ombrages bien-aimés de son enfance. Elle fut tentée de descendre ; et jetant sur elle le voile léger avec lequel elle se promenoit, elle passa sans bruit dans le jardin. Elle gagna fort vite les bosquets éloignés, heureuse encore de respirer un air libre, et de soupirer sans que personne l’observât. Le profond repos de la nature, les riches parfums que le zéphyr répandoit, la vaste étendue de l’horizon et de la voûte azurée, ravissoient son ame, et la portoient par degrés à cette hauteur sublime d’où les traces de ce monde s’évanouissent.

La lune alors étoit élevée ; elle frappoit de sa lumière le sommet des plus grands arbres, et perçoit à travers le feuillage, tandis que la rapide Garonne renvoyoit sa tremblante image légèrement voilée d’un brouillard. Emilie considéra long-temps cette vacillante clarté. Elle écoutoit le murmure du courant et le bruit léger des vents frais, qui sembloient, par moment, caresser les plus hauts châtaigniers. Que le parfum de ces bosquets est délicieux ! dit-elle. L’aimable lieu ! Combien de fois je me le rappellerai ! combien de fois je le regretterai, lorsque j’en serai si loin ! Hélas ! que