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tenue pourroit seule lui donner de la force, elle s’attacha scrupuleusement à bien employer toutes ses heures. C’est bien alors, qu’elle connut le prix de l’éducation qu’elle avoit reçue. En cultivant son esprit, Saint-Aubert lui avoit assuré un refuge contre l’ennui et l’oisiveté. La dissipation, les brillans amusemens, les distractions de la société dont sa position la séparoit, ne lui étoient point nécessaires. Mais en même temps, Saint-Aubert avoit développé les touchantes qualités de son ame ; elle répandoit sa bienveillance autour d’elle, et les maux qu’elle ne pouvoit écarter par ses secours, elle les adoucissoit par la compassion et la bonté ; en un mot, elle savoit compatir aux douleurs de tous les êtres qui souffroient.

Madame Chéron ne répondant point, Emilie commençait à se flatter qu’elle pourroit prolonger sa retraite ; elle se sentoit alors tant de force, qu’elle osa visiter les lieux où le passé se retraçoit le plus vivement à son esprit ; de ce nombre étoit la pêcherie : et pour augmenter dans cette promenade la mélancolie qu’elle aimoit, elle emporta son luth, et s’y rendit à cette heure de la soirée qui convient si bien à l’imagination et à la douleur. Quand Emilie