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dont les fruits, mûrissant parmi les fleurs, exhaloient en l’air un admirable et doux parfum. Il leur joignit quelques arbres d’une autre espèce ; là, sous un large platane, dont les branches s’étendoient jusques sur la rivière, il aimoit à s’asseoir dans les belles soirées de l’été, entre sa femme et ses enfans. Au travers du feuillage il voyoit le soleil se coucher à l’extrémité de l’horizon, il voyoit ses derniers rayons briller, s’affoiblir et confondre peu à peu leurs nuances pourprées avec les tons grisâtres du crépuscule. C’est-là aussi qu’il aimoit à lire, à converser près de madame Saint-Aubert, à faire jouer ses enfans, à s’abandonner aux douces affections, compagnes ordinaires de la simplicité et de la nature. Souvent il se disoit, les larmes aux yeux, que ces momens étoient cent fois plus doux que les plaisirs bruyans et les tumultueuses agitations du monde. Son cœur étoit satisfait : il avoit cet avantage si rare de ne point desirer plus de bonheur qu’il n’en avoit. La sérénité de sa conscience se communiquoit à ses manières, et pour un esprit comme le sien, il prêtoit du charme au bonheur même.

La chute totale du jour ne l’éloignoit pas de son platane favori ; il aimoit ce moment