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teville lui-même, et toutes mes craintes sont confirmées.

Faudra-t-il quitter la Vallée, dit Emilie après un long silence ? — Cela est encore incertain, dit Saint-Aubert, et dépendra du traitement que Motteville pourra faire à ses créanciers. Mon patrimoine, vous le savez, n’étoit pas bien considérable, et maintenant ce n’est presque plus rien. C’est pour vous, Emilie, c’est pour vous, mon enfant, que j’en suis affligé ; à ces mots la voix lui manqua. Emilie tout en pleurs lui sourit tendrement, et s’efforçant de maîtriser son agitation : Mon bon père, lui dit-elle, ne vous affligez pas, ni pour moi ni pour vous… Nous pouvons encore être heureux ; si la Vallée nous reste nous serons encore heureux ; nous ne garderons qu’une servante, et vous ne vous appercevrez pas du changement de votre fortune. Consolez-vous, mon cher papa, nous n’éprouverons aucune privation, puisque nous n’avons jamais goûté toutes les vaines superfluités du luxe, et la pauvreté ne sauroit nous enlever nos plus douces jouissances ; elle ne peut ni diminuer notre tendresse, ni nous abaisser à nos yeux, ou à ceux dont nous estimons le suffrage.

Saint-Aubert se cacha le visage de son