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une forêt épaisse, ce ne fut qu’au bruit des vagues entre les rochers, qu’elle s’aperçut qu’elle était au bord de la mer. Elle se hasarda à demander si elle devait s’embarquer et aller encore bien loin.

— Non, répondit brutalement un de ses gardes, vous serez bientôt au terme de votre voyage et en repos.

Ils descendirent vers le rivage et s’arrêtèrent devant une habitation isolée, si voisine de la mer, que le pied en était baigné par les flots. Les gardes frappèrent à la porte, qui s’ouvrit et donna passage à un homme d’une mine hâve et décharnée, dont la physionomie portait l’empreinte des passions les plus viles.

Elena frémit à sa vue. On la fit pénétrer dans une vieille salle toute nue et toute dégradée, puis dans une mauvaise chambre à peine meublée, qui semblait être celle de Spalatro : c’est le nom que les gardes donnèrent à leur hôte. Celui-ci jeta sur Elena un regard curieux et sournois. La jeune femme frémit : l’idée d’avoir été amenée là, dans ce lieu isolé, au bord de la mer, pour être mise entre les mains d’un pareil homme la frappa d’une terreur profonde.

Spalatro, prenant une lampe, la conduisit dans une chambre délabrée où il lui dit qu’elle passerait la nuit. Il lui montra un mauvais grabat et se retira en ricanant. Restée seule, Elena visita la chambre. Elle n’y aperçut qu’une porte, celle par laquelle elle était entrée, et une fenêtre garnie de barreaux de fer. Elle remarqua avec effroi que la porte ne pouvait se fermer à l’intérieur. D’autre part, elle avait entendu Spalatro la verrouiller à l’extérieur.

La pauvre orpheline tomba anéantie, désespérée, sur le grabat. Un pressentiment horrible lui disait qu’on l’avait amenée là, non pour l’y garder prisonnière, mais pour l’y faire mourir et jeter son cadavre à la mer. En proie à la fièvre, elle appelait Vivaldi à son secours, Vivaldi si loin d’elle et qu’elle ne reverrait plus…