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tâche, et il me fit, à travers la grille, le récit que je vais vous répéter.

« – J’ai été toute ma vie, me dit le pénitent, l’esclave de mes passions, et elles m’ont conduit aux plus déplorables excès. J’avais un frère…

« Là, il s’arrêta ; et de nouveaux gémissements trahirent l’excès de ses angoisses. Puis il reprit :

« – Ce frère avait une femme… écoutez bien, mon père, et dites si je puis espérer l’absolution… une femme très belle !… Je l’aimais, elle était vertueuse et je désespérais. Ô mon père, continua-t-il avec un accent effrayant, avez-vous jamais connu les fureurs et le délire du désespoir ? Le mien enflamma toutes les passions de mon âme, et les aiguillonna par des tortures atroces dont je résolus de me délivrer à tout prix. Mon frère mourut…

« Le pénitent s’arrêta encore. Le ton dont il avait prononcé ces derniers mots me fit frémir. Ses lèvres serrées se refusaient à articuler aucun son ; je lui dis de continuer.

« – Mon frère mourut, reprit-il, loin de chez lui.

« Il s’interrompit de nouveau, si longtemps, que je me décidai à lui demander de quelle maladie son frère était mort.

« – De ma main, mon père, répondit-il d’une voix sourde. Oui, de ma main ! C’est moi qui ai été son meurtrier. Je fis en sorte qu’il mourût loin de chez lui, et je ménageai si bien les apparences que sa veuve n’eut aucun soupçon sur son genre de mort. À peine le temps de son deuil était-il expiré que je demandai sa main ; mais elle gardait un tendre souvenir de mon frère et elle me la refusa. Qu’importe ? Ma