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juge. Ce serait donc à la crainte que vous obéiriez et non pas à l’amour de la justice.

— Ah ! mon père, murmura la marquise, quelle est donc votre pensée ?

— Je crois vous l’avoir dite, réplique Schedoni, et mes paroles n’ont pas besoin d’autre explication.

La marquise demeura pensive et silencieuse. Son âme n’était pas encore familiarisée avec le crime et l’action que Schedoni lui faisait entrevoir l’épouvantait. Elle n’osait y arrêter sa pensée, encore moins l’appeler par son nom. Cependant son orgueil était si irrité et son désir de vengeance si ardent que ces passions soulevaient dans son âme une véritable tempête, prête à emporter tout ce qui y restait d’humain. Schedoni observait ces mouvements et en mesurait les progrès.

— C’est donc votre opinion, mon père, reprit la marquise après un long silence, qu’Elena… que cette artificieuse fille mérite… mérite une sévère punition ?

— Certainement, répliqua Schedoni. Et cette opinion n’est-elle pas aussi la vôtre ?

— Ainsi, continua la marquise, vous pensez qu’aucune peine ne saurait être trop sévère ? que la justice et la nécessité demandent… Quoi ?… Sa mort ? N’est-ce pas là ce que vous avez dit ?

— Moi, madame ? Pardonnez. Je puis être égaré par le soin de votre bonheur ; je n’ai prétendu énoncer qu’un avis dicté par mon zèle et par la justice, et si je me suis laissé emporter trop loin…

— Alors, mon père, vous ne pensez donc pas ?… dit la marquise avec humeur.