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crainte que Vivaldi ne découvrît la retraite d’Elena, lorsqu’elle apprit tout à coup par un messager de l’abbesse que la jeune fille s’était évadée du couvent sous la conduite de son fils. À cette nouvelle, la fureur s’empara d’elle et détruisit dans son cœur tous les sentiments d’une mère. Sa première pensée fut d’envoyer chercher son conseiller ordinaire, Schedoni, avec qui elle pourrait du moins soulager son cœur et s’entendre sur les moyens de rompre un mariage si redouté. Le confesseur arriva vers le soir. Il avait appris, de son côté la fuite d’Elena : elle s’était dirigée, lui avait-on dit, du côté de Celano, et il la croyait déjà mariée avec Vivaldi. À ces paroles, la marquise ne mit plus de bornes à sa violence et à son désespoir. Schedoni l’observait avec une joie secrète. Le moment était donc arrivé, pensait-il, où il pourrait diriger cette femme à son gré et obtenir d’elle les moyens de se venger de Vivaldi sans s’exposer à ses ressentiments. Aussi, loin d’apaiser la marquise, s’appliqua-t-il à l’irriter encore, mais avec tant d’art qu’il semblait s’efforcer au contraire de pallier les fautes du jeune homme et de consoler sa mère.

— C’est certainement une démarche inconsidérée, dit-il, mais il est jeune, très jeune, et ne saurait prévoir les suites fatales de son imprudence. Il ne sent pas combien sa conduite blesse la dignité de sa maison ni tout ce que votre nom y perdra d’importance. Enivré des folles passions de la jeunesse, s’il méconnaît aujourd’hui des avantages dont l’expérience nous enseigne le prix, c’est qu’il ignore qu’en les négligeant il se dégrade lui-même aux yeux de tous. Le pauvre jeune homme est plus à plaindre qu’à blâmer.