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TRAGÉDIE. ij

Tu fais combien je dois à fes heureux fecours. La mort m'avoit ravi les auteurs de mes jours. Mais lui , voyant en moi la fille de fon frère , Me tint lieu , chère Elife , & de père & de mère. Du trille état des Juifs jour & nuit agité , Il me tira du fein de mon obfcurité ; Et fur mes foibles mains fondant leur délivrance , Il me fit d'un empire accepter l'efpérance, A fes delleins fecrets tremblante j'obéis. Je vins. Mais je cachai ma race & mon pays. Qui pourroit cependant t'exprimer les cabales Que formoit en ces lieux ce peuple de rivales » Qui toutes , difputant un fi grand intérêt , Des yeux d'Afluérus attendoient leur arrêt î Chacune avoit fa brigue ôc de puiflàns fuftrages. L'une d'un fang fameux vantoit les avantages. L'autre, pour fe parer de fuperbes atours , Des plus adroites mains empruntoit le fecours. Et itioi, pour toute brigue & pour tout artifice , De mes larmes au ciel j'offrois le facrifice.

Enfin , on m'annonça l'ordre d'Afiliéius, Devant ce fier monarque, Elife, je parus. Dieu tient le cœur des rois entre fe,-; mains puifTantcs j Il fait que tout profpère aux amcs innocentes , Tandis qu'en fes projets l'orgueilleux eft trompé. De mes foibles attraits le roi parut frappé. Il m'obferva long-temps dans un fombre filence; Et le ciel , qui pour moi fit pancher la balance , Dans ce temps-là , fans doute , agifloit fur fon cœur. Enfin , avec des yeux où régnoit la douceur : Soyez reine , dit-il ; & , dès ce moment même , De fa main fur mon front pofa fon diadème. Pour mieux faire éclater fa joie Se fon amour , Il combla de préfens tous les Grands de fa cour ; Et même fes bienfaits, dans toutes fes provinces , Invitèrent le peuple aux noces de leurs princes.

Hélas, durant ces jours de joie & de feftins. Quelle éioit en fecreç ma hgnçc & mes chagrins î

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