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Elle n’entend, ni pleurs, ni conſeil, ni raiſon ;
Elle implore à grands cris le fer & le poiſon.
Vous ſeul vous lui pouvez arracher cette envie ;
On vous nomme, & ce nom la rappelle à la vie.
Ses yeux toujours tournés vers votre appartement,
Semblent vous demander de moment en moment.
Je n’y puis réſiſter, ce ſpectacle me tue.
Allez, Seigneur, allez vous montrer à ſa vue.
Sauvez tant de vertus, de graces, de beauté,
Ou renoncez, Seigneur, à toute humanité.
Dites un mot.

Titus

Dites un mot. Hélas, quel mot puis-je lui dire ?
Moi-même, en ce moment, ſais-je ſi je reſpire ?


Scène VIII.

TITUS, ANTIOCHUS, PAULIN ARSACE, RUTILE.
Rutile

Seigneur, tous les tribuns, les conſuls, le ſénat,
Viennent vous demander au nom de tout l’état.
Un grand peuple les ſuit, qui, plein d’impatience,
Dans votre appartement attend votre préſence.

Titus

Je vous entends, grand Dieux ! vous voulez raſſurer
Ce cœur que vous voyez tout prêt à s’égarer.

Paulin

Venez, Seigneur, paſſons dans la chambre prochaine ;
Allons voir le ſénat.

Antiochus

Allons voir le ſénat. Ah, courez chez la reine.

Paulin

Quoi, vous pourriez, Seigneur, par cette indignité,
De l’empire à vos pieds fouler la majeſté !