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TRAGÉDIE. 3is

Pour en développer l'embarras incertain ,' Ma fœur du fil fatal eût armé votre mr.in. Mais non , dans ce delîein je l'aurois devancée. L'amour m'en eut d'abord infpiré la penfée. C'eft moi , prince , c'ell moi , dont l'utile fecou» Vous eût du Labyrinthe enCeigné les détours. Que de foins m'eût coûté cette tête charmante î Un fil n'eût point afl'ez ralTuré votre amante. Compagne du péril qu'il vous falloir chercher , Moi-même devant vous j'auroj^ voulu marcher 5 E: Phèdre au labyrinthe avec vous defcendue , Se feroit avec vous retrouvée ou perdue.

HiPPOLYTE.

Dieux , qu'eft-ce que j'entends ? Madame , oublier-vous Que Théfée eft mon père , & qu'il eft votre époux i

Phèdre. Et fur quoi jugez-vous que j'en perds la mémoire , Prince ? Aurois-je perdu tout le foin de ma gloire ?

HiPPOLYTE.

Madame, pardonnez. J'avoue , en rougiflant , Que j'accufois à tort un difcours innocent. Ma honte ne peut plus foutenir votre vue 5. Et je vais . . .

Phèdre. Ah , cruel, tu m'as trop entendue. Je t'en ai dit aflez pour te tirer d'erreur. Hé bien, connois donc Phèdre & toute fa fureur. J'aime. Ke penfc pas qu'au moment que je t'aime , Innocente à mes yeux, je m'approuve moi-même j. Ni que du fol amour qui trouble ma raifon y Ma lâche complaifance ait nourri le poifon. Objet infortuné des vengeances céleftes , Je m'abhorre encor plus que tu ne me déteftes. Les dieux m'en font témoins, ces dieux qui, dans mon flan Ont allumé le feu fatal à tout mon fang ; Ces dieux qui fe font fait une gloire cruelle De réduire le cœur d'une foiblc mortelle.

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