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TRAGÉDIE. i6<)

Il fait votre defTein , jugez de £es allarmes. Ma mère eft devant vous , & vous voyez fes larmes. Pardonnez aux efForcs que je viens de tenter, Pour prévenir les pleurs que je leur vais coûter.

Agamemno». Ma fille, il eft trop vrai. J'ignore pour quel crime La colère des dieux demande une viftime. Mais ils vous ont nommée. Un oracle cruel Veut qu'ici votre fang coule fur un autel. Pour défendre vos jours de leurs loix meurtrières. Mon amour n'avoir pas attendu vos prières. Je ne vous dirai point combien j'ai réiîfté. Croycz-en cet amour, par vous-même attefté. Cette nuit même encore , on a pu vous le dire , J'avois révoqué l'ordre où l'on me fit foufcrire. Sur l'intérêt des Grecs vous l'aviez emporté. Je vous facrifiois mon rang, ma fureté. Arcas alloit du camp vous défendre l'entrée. Les dieux n'ont pas voulu qu'il vous ait rencontrée. Ils ont trompé les foins d'un père infortuné, Qui protégeoit en vain ce qu'ils ont condamné. Ne vous affurez point fur ma foible puifTance, Quel frein pourroit dHin peuple arrêter la licence , Quand les dieux, nous livrant à fon zèle indifcret , L'afFranchifîent d'un joug qu'il portoit à regret î Ma Fille, il faut céder. Votre heure eft arrivée. Songez-bien dans quel rang vous êtes élevée. Je vous donne un confeil qu'à peine je reçoi ; Du coup qui vous attend , vous mourrez moins que moi. Montrez, en expirant, de qui vous êtes née. Faites rougir ces dieux qui vous ont condamnée. Allez. Et que les Grecs, qui vont vous immoler, Reconnoiflent mon fang en le voyant couler,

Clïtemnestre. Vous ne démentez point une race funefte. Oui , vous êtes le fang d'Atrée &: de Thyefte. Bourreau de votre fille, il ne vous relie enfin Que d'en faire à fa mère un horrible feftin.

Miij

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