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TRAGÉDIE. 151

Achille. Non, non, tous ces décours font trop ingénieux. Vous lifez de trop loin dans les feciets des dieux. Moi, je m'arrêteiois à de vaines menaces 1 Et je fuirois l'honneur qui m'arrend fur vos traces î Les parques à ma mère, il eft vrai, l'ont prédit, Lorfqu'un époux mortel fut reçu dans fon lit. Je puis choiiir, dit-on, ou beaucoup d'ans fans gloire. Ou peu de jours fuivis d'une longue mémoire. Mais , puifqu'il faut enfin que j'arrive au tombeau, Voudrois-jc , de la terre inutile faideau , Trop avare d'un fang reçu d'une dés/ls , Attendre chez mon père une obfcure vieillellc ; Et , toujours de la gloire évitant le fcntier , Ne laiiïèr aucun nom , Se mourir tout entier ? Ah , ne nous formons point ces indignes obftacles î L'honneur parle, il fuffir, ce font-lànos oracles. Les dieux font de nos jours les maîtres fouverains ; Mais, Seigneur, notre gloire eft dans nos propres mains. Pourquoi nous tourmenter de leurs ordres fuprêmcs ? Ne fongeons qu'à nous rendre immortels commecuA-méme Et , laifl'ant faire au fort, courons où la valeur Nous promet un deftin aufli grand que le T^ur. C'eîl à Troie, &: j'y cours ; &, quoi qu'on me prédifc. Je ne demande aux dieux qu'un vent qui m'y conduife5 Et quand moi feul enfin il faudroit l'affiéger , Patrode & moi , Seigneur, nous irons vous venger. «  Mais non , c'eft en vos mains que le deftin la livre. Je n'afpire , en effet , qu'à l'honneur de vous fuivre. Je ne vous preQe plus d'approuver les tranfports D'un amour, qui m'alloit éloigner de ces bords; Ce mè.ne amour , foigneux de votre renommée,

eut qu'ici mon exemple encourage l'armée ; î i me défend , fur-tout, de vous abandonner Aux ciinides confcUs qu'on ofe vous donner.

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