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ce que je vois que faut-il que je pense?

Tous deux à me tromper sont-ils d'intelligence?

Pourquoi ce changement, ce discours, ce départ?

N'ai-je pas même entre eux surpris quelque regard?

Bajazet interdit! Atalide étonnée!

O ciel! à cet affront m'auriez-vous condamnée?

De mon aveugle amour seraient-ce là les fruits?

Tant de jours douloureux, tant d'inquiètes nuits,

Mes brigues, mes complots, ma trahison fatale,

N'aurais-je tout tenté que pour une rivale?

Mais peut-être qu'aussi, trop prompte à m'affliger,

J'observe de trop près un chagrin passager.

J'impute à son amour l'effet de son caprice.

N'eût-il pas jusqu'au bout conduit son artifice?

Prêt à voir le succès de son déguisement,

Quoi! ne pouvait-il pas feindre encore un moment?

Non, non, rassurons-nous. Trop d'amour m'intimide.

Et pourquoi dans son cœur redouter Atalide?

Quel serait son dessein? Qu'a-t-elle fait pour lui?

Qui de nous deux enfin le couronne aujourd'hui?

Mais, hélas! de l'amour ignorons-nous l'empire?

Si par quelque autre charme Atalide l'attire,

Qu'importe qu'il nous doive et le sceptre et le jour?

Les bienfaits dans un cœur balancent-ils l'amour?

Et sans chercher plus loin, quand l'ingrat me sut plaire,

Ai-je mieux reconnu les bontés de son frère?

Ah! si d'une autre chaîne il n'était point lié,

L'offre de mon hymen l'eût-il tant effrayé?

N'eût-il pas sans regret secondé mon envie?

L'eût-il refusé, même aux dépens de sa vie?

Que de justes raisons... Mais qui vient me parler?

Que veut-on?

Scène VIII.

Roxane, Zatime

Zatime

Pardonnez si