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O ciel! que faites-vous?

Atalide

Cruel, pouvez-vous croire

Que je sois moins que vous jalouse de ma gloire?

Pensez-vous que cent fois, en vous faisant parler,

Ma rougeur ne fût pas prête à me déceler?

Mais on me présentait votre perte prochaine;

Pourquoi faut-il, ingrat, quand la mienne est certaine,

Que vous n'osiez pour moi ce que j'osais pour vous?

Peut-être il suffira d'un mot un peu plus doux;

Roxane dans son cœur peut-être vous pardonne.

Vous-même, vous voyez le temps qu'elle vous donne.

A-t-elle, en vous quittant, fait sortir le vizir?

Des gardes à mes yeux viennent-ils vous saisir?

Enfin, dans sa fureur implorant mon adresse,

Ses pleurs ne m'ont-ils pas découvert sa tendresse?

Peut-être elle n'attend qu'un espoir incertain

Qui lui fasse tomber les armes de la main.

Allez, Seigneur: sauvez votre vie et la mienne.

Bajazet

Eh bien! Mais quels discours faut-il que je lui tienne?

Atalide

Ah! daignez sur ce choix ne me point consulter.

L'occasion, le ciel pourra vous les dicter.

Allez. Entre elle et vous je ne dois point paraître;

Votre trouble ou le mien nous feraient reconnaître.

Allez; encore un coup, je n'ose m'y trouver.

Dites... tout ce qu'il faut, Seigneur, pour vous sauver.

Acte troisième

====Scène