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Scène III.

AGRIPPINE, BURRHUS, ALBINE.


AGRIPPINE.

HÉ bien, je me trompois, Burrhus, dans mes ſoupçons ?

Et vous vous ſignalez par d’illuſtres leçons.
On exile Pallas, dont le crime peut-eſtre
Eſt d’avoir à l’Empire élevé voſtre Maiſtre.
Vous le ſçavez trop bien. Jamais ſans ſes avis
Claude qu’il gouvernoit n’euſt adopté mon Fils.
Que dis-je ? A ſon Eſpouſe on donne une Rivale.
On affranchit Neron de la foy conjugale.
Digne employ d’un Miniſtre ennemy des Flatteurs,
Choiſi pour mettre un frein à ſes jeunes ardeurs,
De les flatter luy-meſme, & nourrir dans ſon ame
Le mépris de ſa Mere & l’oubly de ſa Femme !

BURRHUS.
Madame, juſqu’icy c’eſt trop toſt m’accuſer.

L’Empereur n’a rien foit qu’on ne puiſſe excuſer.
N’imputez qu’à Pallas un exil neceſſaire,
Son orgueil des long-temps exigeoit ce ſalaire,
Et l’Empereur ne fait qu’accomplir à regret
Ce que toute la Cour demandoit en ſecret.
Le reſte eſt un malheur qui n’eſt point ſãs reſſource.
Des larmes d’Octavie on peut tarir la ſource.