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Le Ciel même en ſecret ſemble la condamner.
Ses vœux depuis quatre ans ont beau l’importuner.
Les Dieux ne mõtrent point que ſa vertu les touche :
D’aucun gage, Narciſſe, ils n’honorent ſa couche.
L’Empire vainement demande un heritier.

NARCISSE.
Que tardez-vous, Seigneur, à la repudier ?

L’Empire, voſtre cœur, tout condamne Octavie.
Auguſte, voſtre ayeul, ſoûpiroit pour Livie,
Par un double divorce ils s’unirent tous deux,
Et vous devez l’Empire à ce divorce heureux.
Tibere, que l’Hymen plaça dans ſa famille,
Oſa bien à ſes yeux repudier ſa Fille.
Vous ſeul juſques icy contraire à vos deſirs
N’oſez par un divorce aſſurer vos plaiſirs.

NERON.
Et ne connois-tu pas l’implacable Agrippine ?

Mon amour inquiet déja ſe l’imagine,
Qui m’ameine Octavie, & d’un œil enflammé
Atteſte les ſaints droits d’un nœud qu’elle a formé,
Et portant à mon cœur des atteintes plus rudes,
Me fait un long recit de mes ingratitudes.
De quel front ſoûtenir ce fâcheux entretien ?

NARCISSE.
N’eſtes vous pas, Seigneur, voſtre Maiſtre, & le ſien ?

Vous verrons-nous toûjours trẽbler ſous ſa Tutelle ?
Vivez, regnez pour vous. C’eſt trop regner pour Elle.
Craignez-vous ? Mais, Seigneur, vous ne la craignez pas.
Vous venez de bannir le ſuperbe Pallas,
Pallas, dont vous ſçavez qu’elle ſoûtient l’audace.

NERON.
Eſloigné de ſes yeux j’ordonne, je menaſſe,