Tout ce que j’ay prédit n’eſt que trop aſſuré
Contre Britannicus Neron s’eſt declaré.
L’impatient Neron ceſſe de ſe contraindre,
Las de ſe faire aimer il veut ſe faire craindre.
Britannicus le geſne, Albine, & chaque jour
Je ſens que je deviens importune à mon tour.
Qui l’avez appellé de ſi loin à l’Empire ?
Vous qui desheritant le fils de Claudius
Avez nommé Ceſar l’heureux Domitius ?
Tout lui parle, Madame, en faveur d’Agrippine.
Il vous doit ſon amour.
Tout, s’il eſt genereux luy, preſcrit cette loy,
Mais tout, s’il eſt ingrat, luy parle contre moy.
Marque dans ſon devoir une ame trop inſtruite.
Depuis trois ans entiers qu’a-t-il dit ? qu’a-t-il fait,
Qui ne promette à Rome un Empereur parfait ?
Rome depuis trois ans par ſes ſoins gouvernée
Au temps de ſes Conſuls croit eſtre retournée,
Il la gouverne en pere. Enfin Neron naiſſant
A toutes les vertus d’Auguſte vieilliſſant.
Il commence, il eſt vray, par où finit Auguſte.
Mais crain, que l’avenir détruiſant le paſſé,
Il ne finiſſe ainſi qu’Auguſte a commencé.
Il ſe déguiſe en vain. Je lis ſur ſon viſage
Des fiers Domitius l’humeur triſte, & ſauvage.