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Je dois mefine un exemple au refte de la Terre.
Je dois vanger fur luy tous les maux de la Guerre ;
Le punir des mal-heurs qu’il a pû prévenir,
Et de m’avoir forcé moy-melîrie à le punir.
Vaincu deux fois, haï de ma belle Princellè.. T

CLEOFILE.
Je ne hais point Porus, Seigneur, je le confeflè.
Et s’il m’eftok permis d’écouter aujourd’hui
La voix de fes mal-heurs qui me parle pour luy,
Je vous dirois, qu’il fut le plus grand de nos Princes l
Que fon bras tut long-temps l’appuy de nos Provinces,

Qiulavouln, peut-eftre, en marchant contre vous Quon le crût digne au moins de tomber fous vos coups,

Et qu’un cneime combat fignalant l’un & l’autre *
Son nom vokft partout à la fcitedu voftre.
Mais fi je le défens, des fbins fi genereux,
Retombent fùr mon Frere & détruifent Ces vœux.
Tant que Porus vivra, que faut-il qu’il devienne J
Sa perte eft infaillible, & peut-eftre la mienne.
Ouy, ouy, fi fon amour ne peut rien obtenir,
1l m’en rendra coupable & m’en voudra punir.
Et maintenant eue or, que voftre cœur s’apprefte
A voler de nouveau de conquefte en conquefte,
Quand je verray le Gange entre mon Frere & vous
Qui retiendra, Seigneur, fon injufte courroux ?
Mon amc loin de vous languira folitaire.
Helas ! s’il condamnoit mes foupirs à Ce taire,
Que deviendroit alors ce Cœur infortuné ?
Oufera le Vainqueur à qui je l’ay donné ?

ALEXANDRE.
Ah c’en eft trop, Madame, & fi ce Cœur fè donne^
Je (çauray le garder, quoy que Taxile ordonne,
Bien mieux que tant d’Eftats, qu’on m’a vu conquerir,