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ACTE IV, SCÈNE III.
ORESTE.

Non, je vous priverai de ce plaisir funeste,
1250Madame : il ne mourra que de la main d’Oreste.
Vos ennemis par moi vont vous être immolés[1],
Et vous reconnoîtrez mes soins, si vous voulez[2].

HERMIONE.

Allez. De votre sort laissez-moi la conduite,
Et que tous vos vaisseaux soient prêts pour notre fuite[3].


Scène IV.

HERMIONE, CLÉONE.
CLÉONE.

1255Vous vous perdez, Madame ; et vous devez songer…

HERMIONE.

Que je me perde ou non, je songe à me venger.
Je ne sais même encor, quoi qu’il m’ait pu promettre,
Sur d’autres que sur moi si je dois m’en remettre.
Pyrrhus n’est pas coupable à ses yeux comme aux miens,
1260Et je tiendrois mes coups bien plus sûrs que les siens.
Quel plaisir de venger moi-même mon injure,
De retirer mon bras teint du sang du parjure,
Et pour rendre sa peine et mes plaisirs plus grands,

  1. Les éditions de 1702, 1722 et 1750 ont :

    Vos ennemis par moi vous vont être immolés.

  2. Entre ce vers et le suivant on lit dans les éditions de 1668 à 1676 :

    Mais que dis-je ? ah ! plutôt permettez que j’espère.
    Excusez un amant que trouble sa misère,
    Qui tout prêt d’être heureux, envie encor le sort
    D’un ingrat, condamné par vous-même à la mort.

  3. On peut comparer cette scène avec la scène i de l’acte II de Pertharite. « Eduïge, dit Voltaire, est avec son Garibalde précisément dans la même situation qu’Oreste avec Hermione. » Voltaire marque aussi quelques ressemblances entre la même scène de Pertharite et la scène ii de l’acte II dans Andromaque.