3 o6 BÉRÉNICE.
Quelle honte pour moi, quel présage pour elle, Si, dès le premier pas, renversant tous ses droits, Je fondois mon bonheur sur le débris des lois! Résolu d'accomplir ce cruel sacrifice, J'y voulus préparer la triste Bérénice : Mais par où commencer? Vingt fois, depuis huit jours, J'ai voulu devant elle en ouvrir le discours; Et, dès le premier mot, ma langue embarrassée Dans ma bouche vingt fois a demeuré glacée. J'espérois que du moins mon trouble et ma douleur Lui feroient pressentir notre commun malheur : Mais, sans me soupçonner, sensible à mes alarmes, Elle m'offre sa main pour essuyer mes larmes, Et ne prévoit rien moins, dans cette obscurité , Que la fin d'un amour qu'elle a trop mérité. Enfin , j'ai ce matin rappelé ma constance : Il faut la voir, Paulin, et rompre le silence. J'attends Antiochus pour lui recommander Ce dépôt précieux que je ne puis garder : Jusque dans l'Orient je veux qu'il la remène. Demain Rome avec lui verra partir la reine. Elle en sera bientôt instruite par ma voix; Et je vais lui parler pour la dernière fois.
PAULIN.
Je n'attendois pas moins de cet amour de gloire Qui partout après vous attacha la victoire. La Judée asservie, et ses remparts fumans, De cette noble ardeur éternels monumens, Me répor.doient assez que votre grand courage Ne voudroit pas, seigneur, détruire son ouvrage,
�� �