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plancher, de l’une à l’autre de ces richesses selon le caprice nerveux de celle qui la portait. Toute la pièce était emplie d’un frou-frou colère qui eût fait damner le duc de Pluncey. En face de la psyché, Renée essaya la couronne.

— C’est assez léger ! » dit-elle en relevant la tête d’un mouvement de mépris. Puis elle murmura : combien plus lourde m’est celle-ci ! et elle ôta les pierreries pour se mettre les fleurs d’oranger. Deux fois ses bras retombèrent. La toilette terminée, les femmes de chambre n’eurent plus qu’à déployer dans toute sa longueur, la queue de moire blanche et immense. Après avoir soulevé son voile, on lui jeta, sur l’épaule, une mante d’hermine agrafée par une perle merveilleuse.

Le visage de Renée, dans ce cadre de neige, ressortait aussi pur qu’un lis et ses yeux cerclés de noir semblaient s’agrandir encore.

La future duchesse était certainement mieux qu’une simple mortelle ; c’était déjà une duchesse ! Une duchesse telle qu’aucune cour d’Europe n’en possédait.

Les coups de canon cessèrent. On entendit le galop de l’état-major qui revenait. Puis, un landau arriva, un tapage se fit dehors parmi les vassaux annonçant le fiancé. « Allons ! il faut !… » songea Renée avec un sourire plus terrible que le premier. La porte s’ouvrit, le général entra, couvert de poudre. Le père fut intimidé, malgré l’habitude des champs de bataille !… c’est que ce manteau d’hermine était