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nono

La virilité de Nono n’allait pas au delà.

— Oh ! mon vierge ! » dit-elle avec un sourire qui illumina son beau visage pâle.

Nono s’éloigna lentement.

Cette fois, il avait l’âme trop déchirée… Voilà qu’elle l’accusait d’être vierge ! Sans doute, il ne connaissait point la femme, mais il savait si bien aimer !

Pourquoi donc riait-elle quand il se sentait, lui, d’une pureté saine, bonne, invulnérable, le faisant le meilleur des deux ?

Il revoyait l’amour de marbre gisant sur le lit de satin par une belle nuit… et des rougeurs lui venaient jusqu’aux tempes.

— Allons-nous-en ! pensa-t-il, partons sans le lui dire… allons bien loin, bien loin… c’était ma destinée ! Je suis laid, je suis pauvre, je suis sot, je suis fou, je n’ai que ce que je mérite ! »

Il avait presque envie de se prendre lui-même à la gorge pour lancer sa vilaine peau n’importe où… sa vilaine peau sur laquelle le doux soleil mettait des tons de pétales de roses vus à travers l’ombre !

Miss Bell, la chienne, le salua discrètement.

« La fidélité ne nous sert à rien », semblait dire la bête qu’une crainte mystique avait rendue muette, et elle vint se frotter contre ses jambes, comme si elle avait eu envie de fuir en même temps que lui.

Le général Fayor recevait M. le maire de Gana pendant que son secrétaire, un chenapan, comme il l’affirmait au respectable fonctionnaire, tiraillait en dehors du poste.