Page:Rachilde - Nono, 1885.djvu/188

Cette page a été validée par deux contributeurs.
180
nono

drait les bras devant une glace. Sur les dalles traînaient des linges de batiste mouillés, un long drap de flanelle chiffonné et, dans l’eau s’écoulant, on voyait un bracelet de corail. Le lilas éparpillé formait une écume neigeuse aux remous de la vasque à rendre jalouse une Vénus naissante. Cela sentait beaucoup les fleurs, mais davantage la femme et Nono, les narines dilatées, la bouche brûlante, regrettait maintenant d’être là. Il se figurait sa laideur parmi ces beautés, sa gaucherie parmi ces grâces.

— Nono, dit Mlle Fayor, arrangeant ses cheveux qu’elle peignait toujours elle-même, tu es bien malheureux, n’est-ce pas ?

— Oh ! oui ! répondit l’enfant dont la raison se perdait.

— Pourquoi baisses-tu ainsi les yeux ?

— Je ne veux plus que vous puissiez voir mes larmes !

— Je te défends de pleurer. »

Il se coucha à ses pieds qu’il se mit à caresser du bout des doigts, craignant de briser cette chose fragile veinée d’azur et de rose.

— Resterais-tu longtemps comme cela si je te le permettais ?

— Toujours !

— Et si le duc de Pluncey était mon mari ?

Nono se redressa sur les genoux.

— Je passerais devant toi sans même me souvenir de ta permission.

Il s’aperçut alors qu’elle déroulait complètement ses cheveux au lieu de se coiffer.