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monsieur vénus

tout : Raoule de Vénérande, je vous maudis.

La chanoinesse parlait très bras et cependant Raoule crut entendre retentir les éclats de cette malédiction jusque dans la tranquillité de la chambre nuptiale.

Elle eut un tressaillement superstitieux.

— Vous savez tout ? expliquez vos paroles, ma tante ! Le chagrin de me voir porter un nom roturier vous trouble-t-il la raison ?

Vous êtes la belle-sœur d’une prostituée. Elle était ici tout à l’heure, cette fille, oubliée dans vos invitations ; elle m’a forcée à me pencher sur le gouffre. Vous n’étiez pas la maîtresse de Jacques Silvert, Raoule de Vénérande, et je le regrette à présent de toute mon âme ! Mais souvenez-vous bien, fille de Satan ! que les désirs contre nature ne sont jamais assouvis. Vous rencontrerez la désespérance au moment où vous croirez au bonheur ! Dieu vous précipitera dans le doute au moment où vous toucherez à la sécurité. Adieu… je vais prier sous un autre toit.

Raoule, immobilisée dans l’impuissance