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vate, et ses cheveux, ébouriffés, longs comme des cheveux de jeune premier 1830, l’auréolaient de leurs mèches grises… un type de martyr en petite tournée artistique. Ce n’était pas un comédien, mais il avait péroré à Belleville, ce brave papa Tranet.

L’indignation de Caroline se manifesta par un roulement de prunelles furibond.

— Eh bien, quoi ? demanda Tranet, faut éviter les émotions à la petite ? Parfait ! il y a donc une anguille sous roche ?… Tant mieux, j’aime les baptêmes presque autant que les noces, moi ; j’arrive à propos. Voyons, le petit, venez embrasser votre animal de beau-père. Que diable) Tu as la mine d’un jobard. Et puis, tu sais, mon ami, je suis tellement à sec, tellement panné… (il se rapprocha de Louis) que… veux-tu payer le cocher ? Dis, tu retrouveras ça une autre fois… Où est donc ta femme ?

Étourdi, confondu, Louis allongea son porte-monnaie d’un mouvement machinal. Le père Tranet, tranquillement, régla sa course et jeta quarante sous le pourboire.

— C’est une excellente bête, son cheval, je m’y connais, moi, expliqua-t-il plus à son aise, j’en ai vu des chevaux, à Londres… le pays des coureurs… Eh ! Eh ! nom d’un rabot ! les fiacres sont plus grands chez vous qu’à Paris.

Mme Bartau fit un pas.

— Monsieur Tranet, commença-t-elle, quand vous avez marié votre fille elle n’avait que sa robe de noce sur le corps… une robe en mousseline, même de la mousseline très vulgaire… monsieur Tranet…

Elle eut une suffocation ; l’ex-tonnelier l’interrompit gaiement.