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Désambres dont le regard lança une rapide flamme.

La paysanne, une madrée commère, tourna les talons avec empressement. Louise réfléchissait. Devait-elle regagner sa chambre, ou rester là pour s’étourdir une minute à causer, bien sagement, d’ailleurs ?

— Madame, voulez-vous dîner avec moi ? Puisque vous êtes triste, cela vous distraira, implora le jeune homme jetant à terre son carnier et ses cartouches. J’ai justement tué une grosse perdrix rouge… il est d’usage que le varlet fasse don de sa chasse aux princesses qui le reçoivent… Ici, vous êtes chez vous… je vous ai déjà demandé la permission de boire, je réclame encore la permission de manger, mais à vos côtés, madame. Vous n’avez plus peur, j’espère, l’orage est fini… nous ne sommes plus dans les régions de la foudre.

Il débitait ses phrases avec une affectation marquée de courtoisie, et le fond de sa pensée devait être très sardonique.

— Monsieur, je suis toute seule, ce n’est guère convenable…

— Alors vous ne dînerez pas sous prétexte que je suis entré dans cette auberge où je viens tous les soirs, quand je chasse ?

— Je me ferai servir dans ma chambre.

— Ah ! nous allons être bien servis… l’un en bas, l’autre en haut, et cette vieille folle de mère Pichonneau qui a des rhumatismes… La perdrix, le poulet, la salade, la crème, les fruits, tout sera froid.

— Ce n’est pas ma faute, monsieur.

— Comment ? mettez-moi à la porte, par-