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diffuse, c’est la grande Blois où va la Loire menant un bruit de servante affairée, la grande Blois, ébauche incertaine, pâle mirage.

Pleine gaieté partout. Les fauves espèrent qu’on ne chassera pas d’un jour, et les lavandes, les romarins redouble de saveur. Les passereaux, dans le creux des ornières, trouvent leur bain préparé. Les brebis, à travers champs, hument des aromes inconnus, secret des sauvages collines. Deux chevaux vigoureux, aux reins luisants, entraînent une charrue avec des airs guerriers… Sérénités des cieux abaissés sur notre terre, pleurs des anges, rayons fidèles, jeune azur, demeurez !…

— Ah ! c’est bon d’aimer ! Restons ici. Je le veux… Oublions tout, notre mère, l’intérêt, les devoirs, et cette vie misérable qui donne plus de sacs de gros sous que de gerbes de clématites !

Et Louise, mollement, s’appuyait au bras de son mari consterné.

— Ah ! c’est bon d’aimer ! Je ne me souviens plus de Tours, te dis-je, je veux rester ici, dans cette cabane pauvre comme une invention de contes de fées ! Je me sens petite fille à cueillir des brins de gazon, durant des années entières. Nous écrirons que nous ne demandons que la moitié de nos rentes ; et maman administrera la fabrique. Puisqu’elle aime le bois mort, qu’elle me laisse au moins les feuilles ; je veux rester ici…

Louis n’osait pas lui répondre. Les femmes ont de ces soudaines hystéries, le docteur l’avait prévenu. Enfin, une drôle de créature tout de même ! Hier, elle se fâchait, le traitait de